Le sport peut servir de vitrine pour porter aux plus hauts des valeurs et des engagements. Et ça, la para-cycliste Marie Patouillet, l’a très bien compris. On la connaît pour son palmarès, oui, mais aussi et surtout pour ses nombreux engagements !

C’est à Versailles que naît Marie Patouillet le 7 août 1988, avec une malformation de la cheville et trois orteils au lieu de cinq au pied. Grande passionnée de sport, elle multiplie les disciplines, jusqu’au jour où on lui annonce qu’elle ne pourra plus courir. Un choc certes, mais un mental de battante qui va la pousser à participer à l’Étape du Tour en 2017. C’est en ayant reçu un dossard pour cette cyclosportive, qui reprend le tracé d’une vraie étape du Tour de France, que Marie Patouillet prend le départ. Après un long effort, elle boucle cette épreuve en neuf heures et vingt-trois minutes, alors qu’elle ne faisait pas de vélo. Animée notamment par ces sensations
sensations de vitesse qui lui manquaient tant, la médecin comprend que le vélo est peut-être le sport qui lui faut.
Vivant en région parisienne, la Française cherche à trouver un club étant en capacité de l’accueillir. "Un seul club était capable de m'accueillir", c’était l’US Créteil, véritable pépinière à talents du cyclisme sur piste français. À partir de 2018, elle se spécialise donc dans ce sport, faisant ses premiers tours de vélodrome à Saint-Quentin-en-Yvelines. Classée en C5, Marie Patouillet commence la compétition sur piste et sur route. Cette catégorie regroupe les athlètes ayant été amputés ou avec un handicap majeur au niveau des membres inférieurs.
« Elle ne pouvait plus courir, mais elle pouvait pédaler. Ça a été le début de quelque chose »
tels sont les mots de Sophie, sa préparatrice mentale. En rejoignant l’INSEP avec comme coach Grégory Baugé, multiple médaillé olympique, la Française a rapidement gravi les échelons.
Ses premiers résultats arrivent de suite au vélodrome d’Apeldoorn aux Pays-Bas en 2019. Elle décroche une médaille de bronze sur le 500 m départ arrêté, sur ces championnats du monde.

L’année d’après, la pistarde échange le bronze pour de l’argent et ce sur deux épreuves : l’omnium et le 500 m.
Avec ses résultats, l’équipe de France commence à la diriger peu à peu vers les Jeux Paralympiques de Tokyo. Contrairement à beaucoup d’athlètes, Marie Patouillet vit plutôt bien le report d’un an de ces Jeux, dû à la crise du Covid-19. Médecin remplaçante en parallèle, elle profite de cette année pour faire un choix important : mettre fin à ce travail

un temps, pourtant indispensable financièrement, pour se concentrer pleinement sur cette première épreuve paralympique. Elle se dirige vers ces Jeux avec l’envie de "faire ses meilleures performances", sans forcément penser aux médailles. Et pourtant, elle revient avec deux médailles de bronze, mais surtout un constat frappant : aucune Française n’a remporté de titre paralympique !
"Pour moi, s’il n’y a pas de valeurs ni d’engagements derrière, les médailles en elles-mêmes n’ont pas de sens"
c’est sans doute avec ces mots en tête que Marie
Patouillet a commencé à se livrer sur son aventure de Tokyo et ses discours sont frappants.
"À un moment, j’évoque l’ambiance sexiste, on me répond alors que si je ne voulais pas d’un sport sexiste, il fallait que je fasse un sport de fille."
Comment, en 2021, peut-on entendre des mots pareils ? Et comment des athlètes féminines peuvent-elles arriver à performer dans ces conditions ? Faire bouger les choses, voilà le combat de Marie Patouillet, sur et en dehors de la piste. Un an plus tard, elle arrive sur les championnats du monde qui avaient lieu en France, avec une coupe de cheveux aux couleurs de l’arc-en-ciel, ouvrant les débats sur les droits LGBTQIA+.
Après des changements, elle se prépare pour vivre l’expérience des Jeux Paralympiques à la maison, lors de Paris 2024. Mais avant, elle a l’opportunité de gagner la poursuite par équipes des championnats de France, en 2023, et cela en étant entourée de coureuses valides, et ça ce n’est pas tous les jours. C’est une belle image qui permet de mettre en avant le handisport, encore trop souvent laissé de côté.
Engagée dans la lutte contre le sexisme, pour l’accessibilité du sport aux personnes en situation

de handicap et les droits LGBT+, entre autres, Marie Patouillet arrive aux JO de Paris 2024, avec beaucoup de motivation. La triple championne du monde veut vibrer une dernière fois, qu’importent les résultats, vivre des émotions fortes devant son public, avant de raccrocher le vélo. C’est dans le vélodrome olympique de Saint-Quentin-en-Yvelines, que la pistarde va disputer ces dernières courses.
29 août, finale du 500 m et la voilà vice-championne olympique, première athlète à ramener une médaille dans le clan français. Déjà là, on sait que ces adieux sont réussis, mais on était très loin de s’imaginer l’énorme joie que l’on allait vivre, quelques jours après. Rendez-vous

pour la finale de la poursuite, la dernière course sur piste de sa carrière. Duel franco-français, car sa concurrente est tout simplement Heïdi Gaugain. La cycliste s’élance en n’étant absolument pas la favorite, mais gagner une médaille d’argent olympique pour sa dernière course, c’est déjà pas mal… Les deux s’élancent et là, contre toutes attentes, le chrono bascule au vert en faveur de Marie Patouillet. Le vélodrome s’enflamme et l’ambiance s’envole, conscient que l’histoire est en train de s’écrire juste sous leurs yeux. Parce que oui, la pistarde a été sacrée championne paralympique pour la dernière course de sa carrière. Sortir par la très grande porte, c’est ce qu’elle a fait, et de quelle manière ! Course finie et Marie Patouillet se dirige immédiatement vers sa compagne, l’actrice Soraya Garlenq, un baiser dont les images ont fait le tour de la planète et qui montre tellement bien l’engagement fort de la Française.
Aujourd'hui véritable modèle pour la nouvelle génération, elle a su conquérir le cœur du peuple français par son palmarès et surtout par son engagement sans faille.