Pionnière incontestée du triple saut africain, Françoise Mbango Etone a dû, dès ses débuts, surmonter les carences de sa fédération pour imposer son talent sur la scène mondiale. Découvrez son histoire !

Née en 1976 à Yaoundé, Françoise Mbango Etone fait ses premiers pas en athlétisme au collège Sainte‑Thérèse de Bertoua. Bonne sprinteuse, elle décide de se consacrer très rapidement aux épreuves du saut en hauteur, en longueur et le triple saut. Rapidement, l’athlète domine les compétitions scolaires. En 1990, Françoise fait la rencontre de l’entraineur de la Société nationale des Électricités du Cameroun. Sous l’œil attentif de son nouveau coach, elle affine sa technique de saut.
En quelques années, sa progression est fulgurante puisqu’elle remporte le titre national en saut hauteur au début des années 90. En 1995, l’athlète participe à sa toute première compétition sous les couleurs du Cameroun lors des du championnat d’Afrique
centrale. Pour sa première, Françoise repart avec la médaille de bronze au triple saut, le premier d’une grande série. L’année suivante, la Camerounaise prend part aux championnats d’Afrique et repart de nouveau avec le bronze. Ses premières expériences la forgent mentalement.
1998 signes l’année de son éclosion au niveau mondial. En effet, cette saison-ci, elle remporte notamment l’argent aux Jeux du Commonwealth au triple saut, une discipline pourtant dominée par les Européennes à l’époque. Cette explosion se poursuit en 1999, lorsque Françoise réalise un bond de 14,70m pour remporter les Jeux Africains. Cette victoire lui offre alors sa qualification pour les Jeux Olympiques de Sydney. En 2000, la
Camerounaise apparaît dans une épreuve où elle ne concourt que rarement le 4x100m lors des championnats d’Afrique. L’athlète contribue au bronze. Cette même année, Françoise va se tester pour la première fois avec les meilleures mondiales lors des JO. Pour cette première, elle se qualifie en finale terminant enfin de compte à une belle dixième place.

Après les Jeux Olympiques de Sydney, Françoise Mbango Etone explose aux yeux du public. En 2001, elle termine à la deuxième place lors des mondiaux, derrière sa future rivale Tatyana Lebedeva. L’année suivante, elle confirme en gagnant tout simplement la Coupe du Monde des Nations et réalisant une marque à 14,95m aux championnats d’Afrique, battant le record continental. Sa montée en puissante continue. En 2004, l’athlète doit s’encadrer elle-même n’ayant plus d’entraîneur :
"Je n'ai aucun encadrement, à part ma petite sœur, 22 ans, qui s'entraîne avec moi. Aujourd'hui, je m'entraîne encore avec le programme d'il y a cinq ans de mon ancien entraîneur russe : Monsieur Victor [Kouzine]."
Avant les Jeux Olympiques, la Camerounaise décide de se raser le crâne pour faire une dédicace à sa maman atteinte d’un cancer.

À Athènes, elle réalise un bond historique de 15,30 m (troisième performance mondiale de tous les temps), ajoutant cinq sauts au delà des 15 m en une seule finale, et s’adjuge l’or. Ce jour-là, elle devient tout simplement la première Camerounaise à remporter un sacre olympique (homme compris). Après cette victoire historique, Françoise déclare :
"J'éprouve un grand bonheur non seulement pour moi mais aussi pour le Cameroun et même l'ensemble du continent africain. J'espère que cette médaille fera en sorte que, dans mon pays et en Afrique, on comprenne que les sports individuels peuvent unir le monde dans un stade, peuvent donner une belle image d'un pays."
De retour des Jeux Olympiques, le Président lui promet de lui offrir 84 millions franc CFA pour qu’elle puisse préparer la prochaine édition et continuer à s’entraîner à l’INSEP. Or cet argent, l’athlète n’en verra jamais la couleur. Françoise doit continuer tout de même à s’entraîner mais en situation très précaire :
"Je me suis retrouvée en France en train d’escalader les murs de l’INSEP pour pourvoir travailler […] Je me suis retrouvée en France en train de voler le métro parce que je n’avais pas d’argent pour le payer."
L’athlète ne revient plus sur les grandes compétitions avant 2008 dû à des conflits avec sa fédération et à la naissance de fils en 2006. Pour son retour, elle signe un saut à 14,50m lors d’un concours à Yaoundé. Normalement qualifiée pour les Jeux Olympiques, Françoise se voit refuser d’y participer par sa fédération puisqu’elle n’a pas voulu participer aux Jeux Africain de 2007. Heureusement, la Camerounaise remporte les championnats d’Afrique et
le CIO l’autorise donc à concourir malgré sa suspension par sa fédération. Aux Jeux Olympiques, Françoise marque l’histoire en battant son record avec un bond de 15,39 mètres synonyme de victoire :
"Je suis très contente d’avoir réalisé ça. Je savais que je pouvais le faire. J’ai pris tout mon temps pour le faire. J’ai considéré cette compétition comme une mission (…) Il y a quatre ans que j’ai été envoyée en mission par le président de la République, Paul Biya, qui m’a cité en exemple à la jeunesse."

C'est seulement après cette victoire que l’athlète reçoit l’argent qui lui était promis.
Après les Jeux Olympiques de Pékin, Françoise commence les démarches pour être naturalisée française à la suite de plusieurs mésententes avec la fédération camerounaise. A partir de 2010, l’athlète concourt sous les couleurs de la France. Deux ans plus tard, elle participe à sa dernière grande compétition lors des championnats d’Europe. Lors de cet événement, Françoise termine huitième et loupe la qualification olympique. Elle décide alors d’arrêter la compétition à haut niveau pour se consacrer à de nouveaux projets toujours liés au sport. C’est ainsi qu’en 2020, Françoise ouvre sa propre académie de sport à Yaoundé dans l’objectif d’aider les jeunes athlètes à se professionnaliser.
Aujourd’hui, elle est plus qu’une championne pour les Camerounais. Françoise est devenue leur symbole, une source inspiration qui les pousse à toujours croire en eux et leur rêve.